L'Homme entre...... ses deux Maîtresses


Précédente Remonter Suivante

L'Homme entre deux âges, et ses deux Maîtresses.

Un homme de moyen âge, 
Et tirant sur le grison, 
Jugea qu'il était saison 
De songer au mariage. 
Il avait du comptant, 
Et partant 
De quoi choisir. Toutes voulaient lui plaire; 
En quoi notre amoureux ne se pressait pas tant; 
Bien adresser n'est pas petite affaire. 
Deux veuves sur son cœur eurent le plus de part : 
L'une encor verte, et l'autre un peu bien mûre, 
Mais qui réparait par son art 
Ce qu'avait détruit la nature. 
Ces deux Veuves, en badinant, 
En riant, en lui faisant fête, 
L'allaient quelquefois testonnant, 
C'est-à-dire ajustant sa tête. 
La Vieille à tous moments de sa part emportait 
Un peu du poil noir qui restait, 
Afin que son amant en fût plus à sa guise. 
La Jeune saccageait les poils blancs à son tour. 
Toutes deux firent tant, que notre tête grise 
Demeura sans cheveux, et se douta du tour. 
Je vous rends, leur dit-il, mille grâces, les Belles, 
Qui m'avez si bien tondu; 
J'ai plus gagné que perdu : 
Car d'Hymen point de nouvelles. 
Celle que je prendrais voudrait qu'à sa façon 
Je vécusse, et non à la mienne. 
Il n'est tête chauve qui tienne, 
Je vous suis obligé, Belles, de la leçon.

jmA